Bon.
Yubata, c'est là où tu dois habiter maintenant. Tu regardes la foule, inspire. La plus grande ville de cet univers, c'est ça ? Les villes sont partout les mêmes, au moins là dessus tu seras pas trop dépaysé. T'avais déjà la nostalgie de Boston, de son béton et de ses bâtisses grises, mais la masse grouillante qui se presse devant toi te rappelles déjà un peu la maison.  Faut se contenter de peu, dans la vie. Après, c'est vrai que c'est un peu plus coloré que tes habitudes.

"Excusez moi, poussez vous, poussez vous, excusez moi.."

Tu piétines un ou deux pieds au passage, tu aurais pu faire sans, mais tu n'avais pas vraiment envie de les éviter. Et là, comme par miracle, un chemin s'ouvre dans la foule. Tu te faufiles, esquives, enfin tu sors de ce dédale humain.  En fait, tu t'y es enfoncé tête baissée, mais tu oublies que la ville autour, tu la connais pas. Alors tu regardes autour de toi, cherche un point de repère, te rappelles que tu n'en as pas, et décide de chercher un plan.
Et c'est là que tu le vois. Le messie, le sauveur. En roux. Celui en qui tu viens de placer tout tes espoirs. Il est un peu plus jeune que toi, mais il doit connaître la ville. Bien sûr, qu'est ce qu'il ferait ici sinon ?

"HEY, TOI. Oui, toi, parfait."

Il te regarde, surpris, a pas l'air de très bien comprendre, peut être qu'il est un peu retardé. C'est bien ta chance. Mais bon, c'est lui que tu as choisi. Alors tu lui montres ta carte, pointe du doigt la zone où on t'a alloué ton appartement.

"Hey, écoute.. Je viens d'arriver ici, et il faudrait que j'aille ici, c'est là où je suis sensé habiter."

Bon. Ca a pas l'air de marcher.

"Heu.. Sinon tu peux m'emmener l'office de tourisme, ça me convient aussi."

Walt, comme d'habitude, laisser sa petite personne trainer à droite et à gauche. Parce que c'était la seule chose dont il était capable, à part sculpter. Il ne savait pas doser, c'était un fait. Soit il passait des journées entières enfermé, à marcher sur un tapis de copeaux de bois, les mains caleuses, soit il vadrouillait. Sans but recherché. Et la chambre restait vide pendant plusieurs jours. Parce qu'il finissait toujours pas trouver où coucher sa petite personne, où voler un peu de nourriture, parfois même à la payer quand il avait un peu d'argent.

Comme il avait déjà trainé ses souliers dans la vallée du vent, il était temps d'aller voir du côté de Yubaba. La petite tête rousse avait toujours eu quelques réticences, notamment à cause de l'agitation. Et puis, il commençait à vraiment bien connaître les rues de ses quartiers, alors il y avait trouvé le confort, et ne voulait plus trop en sortir. Et puis, c'était plus pratique pour s'enfuir ou faire la course.

Question animation, Walt fut servit. Il se demandait si les couloirs et les ruelles étaient parfois vides. La nuit, peut-être ? Et encore. Ca l'étonnerait beaucoup.
Bref, le voilà, au milieu d'une marée humaine. Littéralement. Le genre, qui te bouscule, et qui te fait aller là où t'aurais jamais pensé aller, à la base. Mais tu y es, et tu peux pas vraiment faire demi-tour, parce que, t'es plutôt du genre petit et gringalet. Du coup, Walt se laisser un peu porter par le courant, rebondissant tantôt sur le gros fessier d'une dame pressée, pour aller maladroitement trébucher et se rattraper aux sacs d'une autre.

Il était épuisé rien que d'y être, sans que la journée ne soit terminée.

D'habitude, dans la foule, on vous cause pas trop. On est juste un gens, et on avance avec le reste, on zigzague, on fait contre-courant, mais on est pas beaucoup plus. Chacun à son but précis, et taille la route.

Mais visiblement, y'en a un qui avait pour but de l'interpeller.

Walt avait sursauté quand on lui avait touché l'épaule, et s'était d'abord retourné à droite : personne. Puis à gauche : ah, oui ?
Walt n'aime pas beaucoup, ceux qui sont plus grands que lui. Parce que, ça lui fait encore plus sentir sa petitesse.

"M'noui?"

Il était suspicieux de quiconque l'interpellait, par simple habitude. Surtout un grand gars. Encore plus quand il a l'air aussi sérieux, et aussi, maussade. Parce qu'il lui trouvait un air maussade, à celui-là. Et puis, Walt trouvait que récemment, on l'interpellait beaucoup, et ça ne s'était pas toujours très bien passé. Du coup, il était devenu suspicieux.

En écoutant la requête pressée du grand gaillard, Walt eu un petit hoquet moqueur. Gros malin, t'étais pas tombé sur le bon gars, c'est dommage. Mais il était un peu compatissant. Quand on se décidait enfin à demander à quelqu'un son chemin, et qu'on avait soigneusement choisi quel inconnu serait celui qui aurait la chance d'être abordé, c'était toujours un peu décevant d'entendre un "je ne sais pas".

Alors, Walt avait prit une grande inspiration, et fait un large sourire, avec une toute petite pointe d'air désolé.

"Bhein, je suis pas du coin, alors, je sais pas trop vous aider monsieur, désolé ein."

Il hochait la tête, les mains dans les poches. L'avantage, c'est que ce grand gars le protégeait, un peu, du flux de la populace. Cette dernière s'agitait beaucoup trop. Idéal pour voler quelques sous. Les couleurs, les étalages, tout attirait les regards, les bousculades faisaient ignorer celles qui étaient en réalité des petits vols. Mais pour l'instant, il ne comptait voler personne. A part peut-être ce brave monsieur. Walt se disait que, il était bien bête de n'y penser que maintenant !

"Mais si vous voulez, on peut chercher ! Je crois avoir vu un truc du genre, je crois par là bas, v'nez donc monsieur!"

Et il avait pris son bras, pour le trainer derrière lui, comme le gamin trainant son grand-père. Avec un air enjoué et tout.